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Mission de Saint-Bernard de Claivaux

Carte ancienne : De Carmaux à Castres, en passant par Albi et Réalmont
Carte ancienne : Ambialet, Alban, Castelneau de Brassac et Saint-Amans Valtoret
Carte ancienne : De Saint-Afrique à Murat-sur-Vèbre, et à Olagues (Espinouse et Caroux)

Mission contre les hérétiques henriciens

D'abord, qui étaient les hérétiques henriciens, que l'on a nommé ariens ? Pour résumer, ce sont des disciples d’Henri de Lausanne (qui préconise la condamnation des sacrements, de la liturgie, de la hiérarchie catholique, qui ne veut pas du baptême de l'enfant, qui estime que l'église est inutile pour prier, et qui déteste la croix qui n'est autre que l’instrument de supplice du Christ, et pour couronner le tout, la négation de l'eucharistie, du sacrifice de la messe et l'inutilité des prières pour les morts). Les tisserands du midi ont été les plus nombreux à être attirés par cette hérésie.

Je vais évoquer, toujours avec un extrait de l'histoire générale de languedoc, la mission de Saint-Bernard en albigeois pour prêcher contre cet hérétisme, qui a précédé le catharisme, mais qui montre que le pays était prêt à accueillir l'hérésie. L'époque décrite est l'année 1147. C'est le moment où l'on s'aperçoit que Saint-Bernard n'était pas aimé par tout le monde, mais que les gens, pour avoir la paix, faisaient plus ou moins mine de se soumettre a ses prêches.
Seule, la partie du chapitre qui concerne l'Albigeois sera reproduite. Sachons simplement que Saint-Bernard est venu prêcher dans la région après avoir eu un accueil plutôt favorable et avoir obtenu quelques succès à Toulouse. Le légat du Saint Siège dont il est également question dans le texte est le cardinal Albéric, évêque d'Ostie.


Le légat et Saint Bernard continuèrent leur mission dans le Toulousain et les pays voisins, et parcoururent divers villes ou châteaux, surtout ceux que Henri avait le plus infectés de ses erreurs. Le Saint abbé faisait usage partout du talent de la parole que Dieu lui avait donné : il instruisait les simples, fortifiait les faibles, rappelait les errants et confondait les obstinés;en sorte que rien ne lui résistait : partout il était écouté avec avidité et avec fruit, et partout il avait la consolation de voir abjurer l'erreur. Il prêcha entre autres à Verfeil (Viridefolim), où, suivant l'auteur de sa Vie, était le siège de Satan. C'est une petite ville qualifiée alors château, située à quatre lieues de Toulouse vers le levant. Il y avait cent maisons de chevaliers qui favorisaient tous l'hérésie, Saint-Bernard, comptant que s'il pouvait gagner ces gentilshommes, il lui serait aisé de convertir tous les autres, prêcha dans l'église ; mais les principaux en sortirent dès qu'il eut commencé sa prédication, et à leur exemple le reste des auditeurs en fit autant. Le saint se rendit alors dans la place publique où il continua à prêcher. Les chevaliers se cachèrent aussitôt d'un côté et d'autre, et il ne resta que le petit peuple. Les premiers revinrent ensuite au sermon et firent tant de bruit par leurs clameurs, qu'on ne pouvait rien entendre, ce qui engagea enfin saint-Bernard à se retirer, après avoir secoué la poussière de ses souliers et donné sa malédiction au château :

« Anathème, dit un auteur du milieu du treizième siècle, qui eut son effet ; car tous ces chevaliers, qui étaient auparavant très-riches, moururent par divers accidents dans une extrême pauvreté ; et j'en ai vu, ajoute-t-il, un a Toulouse, dans ma jeunesse, âgé de cent ans, qui était le principal seigneur de Verfeil, réduit à la dernière misère. »

On prétend que le saint, en sortant de ce lieu, se retira dans un endroit du voisinage appelé aujourd'hui le bourg Saint-Bernard à cause de cet événement. Le saint abbé trouva dans sa mission quelques autres chevaliers également prévenus en faveur de Henri, moins par attachement pour ses erreurs, que par la haine qu'ils avaient conçue contre le clergé ; ce qui les portait à écouter avec plaisir les railleries que cet hérétique faisait des ecclésiastiques. Ils promirent tous de ne plus le protéger, attendu qu'il avait refusé de comparaître et d'entrer en conférence, et que pour l'éviter, il fuyait devant le légat et allait de château en château. Ce prélat prononça alors une sentence contre lui et ses sectateurs, et eut soin de faire connaître au peuple, pour le désabuser, le débordement de sa vie.

Saint Bernard, après avoir parcouru le Toulousain, passa à Saint-Paul sur l'Agout, entra dans l'Albigeois et arriva à Albi, la veille de Saint-Pierre. Le légat l'avait précédé de deux jours dans cette ville, dont presque tous les habitants avaient embrassé l'hérésie de Henri ou la favorisaient ouvertement, en sorte que c'était la ville du pays la plus infectée. Aussi le légat y fut-il très mal reçu. Lorsqu'il fut au voisinage, le peuple alla par dérision au-devant de lui, monté sur des ânes et au bruit des tambours ; ce prélat ayant voulu célébrer la messe après son arrivée, à peine se trouva-t-il trente personnes dans l'église pour l'entendre. Le saint abbé étant arrivé trois jours après, les habitants le reçurent au contraire avec de grandes démonstrations de joie ; mai il était si prévenu contre eux, qu'il fut sur le point de refuser l'accueil qu'ils lui firent. Le lendemain, jour de Saint-Pierre, il prêcha dans la cathédrale, et il s'y trouva tant de monde que cette église ne pouvait le contenir. Le saint parla ainsi à ce peuple :

« J'étais venu pour semer, mais j'ai trouvé le champ rempli d'une mauvaise semence ; cependant, comme vous êtes raisonnables, je vais vous montrer l'une et l'autre semence, afin que vous sachiez à quoi vous en tenir. »

Il commença par le sacrement de l'hôtel, et parcourut ainsi tous les points contestés. Il exposa sur chacun ce que les hérétiques enseignaient et ce que la foi exige des fidèles. Il demanda ensuite à ses auditeurs quelle des deux doctrines ils voulaient choisir : ils répondirent tous unanimement qu'ils détestaient l'erreur et reconnaissaient avec joie la parole de Dieu et la vérité catholique.

« Faites donc pénitence, reprit saint Bernard, vous tous qui avez été infectés de l'hérésie, et soumettez-vous à l'Église ; levez au ciel la main droite pour marque de votre retour. » Tous généralement la levèrent, et le saint finit son sermon.

Ce détail, rapporté par un témoin oculaire, nous donne lieu de croire que les habitants d'Albi se convertirent sincèrement ; ainsi nous ne saurions adopter la remarque d'un historien célèbre de nos jours qui fait dériver le nom d'albigeois, qu'on donna dans la suite à ces hérétiques, du grand nombre d'entre eux qui se trouvaient alors dans la ville d'Albi. Il nous paraît au contraire, qu'on doit rapporter l'origine de ce nom à la condamnation qui fut faite, plusieurs années après, dans le concile tenu à Lombers en Albigeois, des sectaires qui avaient renouvelé les erreurs de Henri, non-seulement dans ce pays, mais encore dans une grande partie de Languedoc et de la Guyenne.

Saint Bernard parcourut les principales villes et plusieurs châteaux du domaine du comte de Toulouse, et il demeura dans le pays tout le temps qu'il crut nécessaire pour ramener les hérétiques. Geoffroi, son disciple, qu'il l'accompagnait, avoue néanmoins qu'il y avait un si grand nombre d'erreurs qu'il aurait fallu une mission plus longue pour les extirper entièrement ; mais, ajoute-t-il, le saint abbé ne peut plus soutenir un si pénible travail : il appréhende d'ailleurs d'être trop longtemps absent de son monastère. Geoffroi écrit ensuite aux religieux de Clairvaux que saint Bernard, sur les lettres qu'il avait reçues de ce monastère, s'y rendrait incessamment, et qu'il comptait y arriver peu de temps après l'octave de l'Assomption. Le saint abbé, à son retour, reprit la même route qu'il avait tenue en venant dans le pays, et repassa par Sarlat. Tel fut le voyage de cet homme apostolique dans la Province, où il eut le bonheur de ramener alors à la foi ceux qui s'en étaient écartés;mais malgré tous ses soins, l'hérésie des henriciens y demeura cachée comme le feu sous la cendre, et elle s'y renouvela si fortement quelques années après, qu'elle y causa enfin une extrême désolation.


 

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La cathédrale Sainte Cécile a été inscrite au patrimoine mondial de l'humanité le 31 juillet 2010

Autres sites du même auteur : Le Canal du Midi, Louisa Paulin poétesse occitane

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