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La Langue Romane en usage dans la Province

Carte ancienne : De Carmaux à Castres, en passant par Albi et Réalmont
Carte ancienne : Lavaur, Puylaurens, Naurouze, Castelnaudary

La langue parlée en Province de Languedoc

sachant que cette dénomination de province de Languedoc est encore loin d'exister

An 877

Les auteurs évoquent ici la langue tudesque. Qu'est-ce que c'est ? Selon l'académie Française cela signifie : « Qui est germanique. Les dialectes tudesques. On dit plutôt aujourd’hui Germanique. » Il s'agit donc d'un héritage de l'époque de Charlemagne et des Francs, mais bien sur, si on se plonge dans l'éthymologie, c'est un peu plus compliqué car personne n'ignore que le sens des mots peut varier avec le temps, ainsi, il pourrait aussi bien s'agir de l'ancien Francique.

Je m'interroge aussi sur l'utilisation du mot monuments (qui s'écrivait à l'époque monumens). Pourquoi pas document ou archive ? Je me réfère encore au dictionnaire pour l'un des sens de ce mot au figuré : « Monument : En parlant des productions de l’esprit, des ouvrages qui, par leur ampleur, marquent l’histoire des hommes et sont consacrés par la postérité. Cet ouvrage est un des plus beaux monuments du génie humain, de la philosophie. » C'est certainement dans ce sens qu'il faut lire ce terme ici.


Nous avons déjà prouvé par des monuments du milieu du neuvième siècle que les anciens peuples des Gaules parlaient alors une langue qu'on appelait romane, tandis que les Français se servaient encore de la tudesque. Nous avons remarqué en même temps que la première différait fort peu de celle qu'on parle aujourd'hui dans la Provence, le Languedoc et une partie de l'Aquitaine, preuve que cette langue, qui est une corruption du latin, se forma d'abord dans ces provinces où les habitants étaient, en effet, pour la plupart Gaulois ou Romains d'origine. De là vient sans doute que les auteurs du temps donnent à ces pays le nom de Romanie, de Gaule romaine ou de France romaine.

On peut encore prouver l'usage commun de ces deux langues en France, au neuvième siècle, par le concile de Tours de l'an 813, où il est ordonné aux évêques de faire leurs homélies dans l'une et l'autre de ces langues pour se faire entendre des différents peuples du pays. La première, appelée Romaine rustique par ce concile, devint dans la suite particulière aux provinces méridionales du royaume, et c'est la seule qui y fut en usage depuis que les Francs et les autres peuples barbares, s'étant mêlés et confondus avec les anciens habitants, ne formèrent plus avec eux qu'un seul peuple. D'un autre côté, il se forma par ce mélange une nouvelle langue dans les provinces septentrionales de la monarchie, et comme les Français y étaient en plus grand nombre que les Gaulois ou Romains, on l'appela langue française. Elle se ressentit d'abord de la barbarie de son origine ; mais elle se perfectionna peu à peu, et après avoir exclu en France l'usage de la tudesque, elle a prévalu enfin et est devenue la langue générale de tout le royaume, sans préjudice pourtant de la langue romane qui s'est toujours perpétuée dans les pays méridionaux.

On voit, par ce que nous venons de dire, que la langue romane est bien plus ancienne que la française ; nous avons, en effet, des monuments de la première dès le neuvième siècle ; au lieu que le plus ancien que nous connaissions de l'autre est une traduction des homélies de saint Bernard qui ne remonte pas, par conséquent, au-dessus du douzième [1]. La différence de ces deux idiomes donna lieu à nos rois, vers la fin du treizième siècle, de diviser le royaume en deux parties distinguées par la langue qui était en usage dans chacune, savoir : en langue d'oui (et non oil dans le texte) ou langue française, lingua Gallica et en langue d'oc, lingua Occitana, parce qu'on disait oui dans la première et oc dans l'autre. C'est de là que le nom de Languedoc, qui fut ensuite restreint à notre Province, tire son origine. Au reste, malgré la barbarie qui régnait dans ce pays sous la seconde race, on n'y ignorait pas le latin, puisque tous les actes étaient alors rédigés en cette langue ; elle était même familière aux personnes du sexe, comme on peut le voir par le Manuel composé à Uzès par Dodane, épouse de Bernard, duc de Septimanie, et écrit avec assez de pureté et d'élégance pour ce siècle.

Note :
[1] On voit que dom Vaissete expose ici la théorie de la langue romane, soutenue dans ce siècle-ci par Raynouard. Nous n'avons ni à discuter cette théorie, ni à exposer l'état des connaissances contemporaines sur les origines des dialectes du Midi de la France. Qu'il nous suffise de relever quelques erreurs matérielles qui sont non pas le fait de dom Vaissete, mais celui de son temps. Il dit d'une part que le plus ancien monument de la langue du Nord date du milieu du douzième siècle. On connait aujourd'hui des poèmes, des chansons de geste, dont plusieurs sont plus anciennes d'un siècle, et même quelques fragments remontant jusqu'au dixième siècle, par exemple la Cantilène de Sainte Eulalie, découverte à Valenciennes, en 1837. D'autre part, le plus ancien texte connu écrit en provençal, semble être le poème de Boëce, qu'on attribue communément au dixième siècle. Nous avons déjà relevé plus haut l'erreur de notre auteur qui, dans les Serments de Strasbourg de 842, voyait un texte écrit en dialecte méridional. [A.M.]


 

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Autres sites du même auteur : Le Canal du Midi, Louisa Paulin poétesse occitane

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