Histoire   Géographie   Hauts lieux   Personnages   Galeries Photo   Bastides   Infos   Plan du site 

Origines de la poésie provençale

Carte ancienne : De Cordes à Lautrec et Sémalens
Carte ancienne : Vallée du Tarn, Alban, Vallée du Girou
Carte ancienne : Saint-Salvy de Carcavès, Lacaune et Saint-Pons
Carte ancienne : Albi, Réalmont, Castres, le cœur du Tarn

Origine de la poésie provençale

Les considérations qui suivent concernent l'année 1079 et ont été écrites par les deux moines Bénédictins : Dom DEVIC et Dom VAISSETTE entre 1730 et 1745. Certaines d'entre elles peuvent être contestées, il n'en reste pas moins que c'est la première véritable réflexion historique sérieuse qui concerne l'histoire du Languedoc. Il n'existe pas à cette époque beaucoup de précédents (voire aucun) de cette dimension en France et même au delà.
Ces considérations constituent donc une réflexion tout à fait sérieuse qui permet la compréhension et l'origine des langues française et occitane, en même temps que la mentalité des peuples qui vivaient alors dans ce cadre géographique.


On parlait en Languedoc, au moins depuis la fin du dixième siècle, le même langage qu'on y parle aujourd'hui. C'est ce qui paraît par divers termes employés dans les hommages et serments de fidélité : nous en avons du du milieu du onzième siècle entièrement en langage du pays. On a de semblables actes qui prouvent que la langue des peuples de la Catalogne et des autres pays d'Espagne soumis à la domination française était la même. On l'appelait langue romaine vers la fin du même siècle, de même que celle qu'on parlait dans les autres provinces de France, pour la distinguer de la latine dont se se servait dans les actes publics, mais qui était fort éloignée de sa pureté. C'est de là que vient le nom de romans qu'on a donné aux histoires fabuleuses, soit en prose, soit en vers, depuis le dixième siècle, parce que ces ouvrages furent écrits en langue romaine ou vulgaire. Cette langue était donc commune à tous les peuples de France au onzième siècle, mais il est certain qu'il y eut de la différence dans le suivant entre le langage vulgaire qu'on parlait dans les provinces méridionales du royaume et qu'on appela langue provençale, et celui dont on se servait dans les pays situés à droite de la Loire et qu'on nomma langue française.

«  Le langage romain, dit un célèbre auteur, fut appelé la langue provençale, non-seulement parce qu'il reçut moins d'altération dans la Provence que dans les autres cantons de la France, mais encore parce que les Provençaux s'en servaient ordinairement dans leurs compositions, ou même parce que la Provence étant toujours regardée comme la province des Romains, on ne faisait point de distinction entre le langage provençal et le romain. »

Nous examinerons bientôt si c'est la Provence proprement dite qui a donné seule son nom à ce qu'on appelait langue provençale, mais il paraît toujours par ce témoignage et par divers monuments, que la langue qu'on parlait avent le douzième siècle dans le Languedoc et la Provence, et qu'on appelait langue romaine, est la même que celle qu'on parle encore aujourd'hui dans ces provinces et qui a moins reçu d'altération que dans les autres cantons de la France : par conséquent le provençal est plus ancien que le français, et celui-ci n'a été formé qu'après le onzième siècle.

Quant au nom de provençale, qu'on donna à la langue dont on se servit dans les provinces méridionales de France, après que les peuples des pays septentrionaux eurent adopté un idiome différent, il est certain qu'elle ne fut pas ainsi nommée parce qu'elle fut d'abord particulière aux peuples de la Provence proprement dite, mais à cause qu'on comprenait alors sous le nom de Provençaux tous les peuples de la partie méridionale de la France. Les divers auteurs qui ont écrit à la fin du onzième siècle l'histoire de la première croisade nous en fournissent des preuves.
On nommait Provençaux, dit un de ces historiens, les peuples de Bourgogne, d'Auvergne, de Gascogne, de Gothie et de Provence ; les autres s'appelaient Français, mais les ennemis donnaient le nom de Francs aux uns et aux autres. Les Aquitains étaient aussi compris sous le nom de Provençaux. Suivant le témoignage d'un autre auteur du temps, la différence qu'on mettait entre les peuples qui habitaient le nord de la France, et qu'on appelait Français (François, Francigena), et ceux des provinces méridionales qu'on nommait Provençaux, était fondée sur celle de leur langage. Enfin, une preuve certaine qu'on désignait encore au douzième siècle, et dans une partie du suivant, sous le nom général de Provençaux tous les peuples des provinces méridionales du royaume, c'est le titre de pètes provençaux qu'on donnait alors à tous ceux qui se mêlaient de composer des chansons et autres poèmes en langue vulgaire, car ce nom fut commun non-seulement aux poètes natifs ou habitants de la Provence proprement dite, mais encore du Languedoc, du Dauphiné, de l'Aquitaine, etc.
Il est certain enfin que dans ces siècles la poésie provençale fut plus cultivée dans ces provinces que dans la Provence propre, comme il est aisé de s'en convaincre sur l'autorité de deux anciens manuscrits de la Bibliothèque du roi qui contiennent la vie et les ouvrages de ces poètes. De cent dix d'entre eux ou environ, dont il est parlé dans ce recueil, à peine en trouve-t-on huit à dix natifs de la Provence proprement dite, tandis qu'on en compte deux ou trois fois autant du Languedoc.

Le plus ancien des poètes provençaux dont il soit fait mention dans ce recueil est Guillaume IX, comte de Poitiers et duc d'Aquitaine, né en 1071 et mort en 1116. Il y est qualifié bon troubadour, et l'on y rapporte de lui une chanson écrite en langage provençal. On trouve encore ailleurs quelques autres pièces de ce prince dans la même langue, ce qui nous fait connaître son talent pour la poésie.
« Comme il était fort gai et fort jovial, dit un ancien historien, il chanta après son retour de la terre-Sainte les malheurs qui lui étaient arrivés durant ce voyage, et il fit des vers rimés sur ce sujet. »
Guillaume revint de ce pèlerinage en 1102 ; ainsi c'est au plus tard au onzième siècle qu'on doit rapporter l'origine de la poésie provençale, ainsi nommée non de ce qu'elle a été inventée et mise en usage par les seuls Provençaux proprement dits, mais par tous ceux qu'on appelait alors de ce nom et qui parlaient la même langue, c'est-à-dire par les peuples de Languedoc, Auvergne, Guyenne, Gascogne, etc.

Un illustre Français fait remonter l'origine de cette poésie jusque vers la fin du dixième siècle, contre le sentiment d'un célèbre Italien, qui prétend au contraire que Guillaume IX, duc d'Aquitaine, est le premier versificateur en langue provençale et que ce prince a donné l'origine à la poésie vulgaire. Il faut avouer que nous n'en connaissons pas de plus ancien. Quoi qu'il en soit, ces deux fameux auteurs conviennent que la poésie provençale a donné naissance à la française et à l'italienne. On ne saurait donc guère faire remonter au-dessus du douzième siècle les anciens romans que nous avons en vers français.

Le nom de Provençaux donné dès la fin du onzième siècle et dans le douzième aux peuples des provinces méridionales de France, de même que leur langage, tirent leur origine, à ce qu'il nous paraît, du fameux Raimond de Saint-Gilles qui dominait sur une grande partie de la Provence de même que sur le Languedoc et sur divers pays de l'Aquitaine ; car comme il est certain que les auteurs du temps ont souvent voulu désigner l'étendue de sa domination en le qualifiant simplement comte provincial ou provençal, ou bien comte de Provence, ils auront voulu aussi désigner tous ses sujets sous le nom de Provençaux. Ce n'est en effet que depuis ce prince qu'on a donné ce dernier nom en général aux peuples du voisinage de la Provence proprement dite, et c'est sans doute pour la même raison qu'on a appelé depuis langue provençale le langage de tous ces peuples.

On prétend que depuis le temps du même prince la Gothie ou Septimanie porta communément le nom de province de Saint-Gilles et que cette dénomination dura pendant tout le douzième siècle. Il est vrai que quelques auteurs qui ont vécu dans ce siècle ont donné le nom de province de Saint-Gilles à la Narbonnaise première, mais ce sont des étrangers qui ne sont d'aucune autorité, et qui voyant que les comtes de Toulouse prenaient assez souvent le titre de comte de Saint-Gilles tout seul ont cru faussement que cette dernière ville était la capitale de leur domaine et qu'elle donnait son nom à toute la Province ; mais nous n'avons pas un seul monument domestique qui prove qu'on ait jamais donné à la Septimanie ou au Languedoc le nom de province de Saint-Gilles.


 

Haut de Page
Menu

Aller et venir dans l'histoire

 

La cathédrale Sainte Cécile a été inscrite au patrimoine mondial de l'humanité le 31 juillet 2010

Autres sites du même auteur : Le Canal du Midi, Louisa Paulin poétesse occitane

et le Blog du Canal du Midi

Valid XHTML 1.0! Valid CSS!